Après des débuts difficiles, la thérapie génique semble se montrer prometteuse. Six enfants traités pour deux maladies graves, voire mortelles, se portent bien deux à trois ans après le début de la prise en charge. D’autres cas pourraient confirmer ces résultats dans les mois à venir…
Voilà quelques années, tous les espoirs se portaient
sur la thérapie génique pour soigner les personnes atteintes de maladies
génétiques incurables. Malheureusement, des écueils et des échecs gravissimes
ont un peu douché les ambitions des scientifiques. En effet, certains bébés
traités ont par la suite développé une leucémie du fait de l’inactivation non
désirée d’un gène, causée par la thérapie.
Les chercheurs n’ont pas baissé les bras pour
autant. Et en Italie, les résultats de deux études menées à l’hôpital San
Raffaele de Milan et financées par l’argent du Téléthon montrent qu’il faut y
croire. Pour l’heure, six enfants atteints de maladies génétiques rares et
traités depuis au moins deux ans par thérapie génique semblent bien se porter,
et les symptômes de leurs troubles respectifs ont fortement reculé, voire
disparu.
Des maladies génétiques rares et mortelles enfin
traitées
Trois d’entre eux souffrent du syndrome de
Wiskott-Aldrich (SWA). À cause d’une copie défaillante du gène Was, retrouvé
sur le chromosome X, ces patients souffrent d’une immunodéficience forte qui
les oblige à vivre dans des bulles stériles pour éviter qu’ils succombent à des
maladies normalement bénignes, contre lesquelles ils ne peuvent se défendre.
Les autres sont quant à eux touchés par une
leucodystrophie métachromatique, qui se caractérise par l’accumulation de
sulfate de cérébroside au niveau du système nerveux, du fait là encore d’un
gène défaillant. Entre un et deux ans, les neurones dégénèrent et les enfants
perdent progressivement leurs capacités motrices et cognitives, les conduisant
à une mort précoce.
Des gènes sains introduits grâce au VIH
Après 15 années de travail, d’échecs et de
frustration, les scientifiques ont finalement tenté l’expérience grandeur
nature après avoir obtenu des éléments satisfaisants en laboratoire. Dans un
premier temps, il a fallu retourner l’un de nos pires ennemis pour en faire un
sauveur : le VIH. Après modification du virus du Sida pour le rendre inoffensif
et y insérer le gène d’intérêt, il a été introduit dans des cellules souches de
la moelle osseuse des patients, celles à l’origine des cellules sanguines. Après
manipulation, elles ont été remises à leur place.
Dans le cas du SWA, les cellules souches
hématopoïétiques modifiées (porteuses d’une copie saine du gène) ont
progressivement remplacé les globules blancs déficients. Au bout de 20 à 30
mois de traitement, les auteurs font part dans Science d’une diminution, voire
d’une disparition des symptômes. Aucun effet secondaire majeur n’a pour l’heure
été constaté. Si les résultats se confirment dans la durée, ces enfants
pourront sortir de leur monde stérile et jouer, courir, ou bien aller à l’école
comme tout le monde.
Pour la thérapie génique contre la leucodystrophie
métachromatique, le processus est un peu plus complexe. Les cellules
hématopoïétiques modifiées rejoignent la circulation et atteignent le cerveau.
Ayant été conçues pour produire en excès la protéine défaillante
(l’arylsulfatase A), celles-ci sécrètent dans le milieu extracellulaire ladite
protéine, qui est alors captée par les cellules du cerveau alentour. Ainsi,
elles métabolisent le sulfate de cérébroside et l'empêchent donc de
s'accumuler, empêchant alors la neurodégénérescence de progresser.
La thérapie génique montre ses succès
Les trois enfants ont été traités entre 7 et 15
mois, à des âges où les symptômes n’étaient pas encore apparus. Les résultats,
là encore parus dans un autre article de Science, montrent que l’un d’eux, à 3
ans, possède un QI normal, dispose d’un niveau de langue correct, se tient
debout tout seul et marche très bien en tenant la main de quelqu’un, alors que
sans traitement, les petits de cet âge-là ne parlent pas et sont en fauteuil
roulant. Les deux autres ne présentent aucun symptôme de la maladie à 3 ans,
alors que ceux-ci auraient déjà dû apparaître si la thérapie n’avait pas été
efficace.
Ces essais cliniques ont été rendus possibles grâce
à 19 millions d’euros récoltés par le Téléthon. La recherche contre la
leucodystrophie métachromatique a bénéficié de 11 millions d’euros, les 8
millions restant ayant été dédiés au SWA. En tout, dix autres enfants
participent aux tests, entamés au printemps 2010 (7 pour la première maladie, 3
pour la seconde), mais le traitement est encore trop récent pour que l’on ait
assez de recul sur leurs cas.
Ces six premiers patients ne sont pas encore tirés
d’affaire, et vont bénéficier d’un suivi régulier pour s’assurer que la
thérapie génique n’induit pas d’effets secondaires sérieux, et pour vérifier la
durée d’efficacité des traitements. Mais cette double annonce ravive un espoir
qui semblait peu à peu retomber chez des parents, inquiets de voir que les
grandes promesses d’hier ne se concrétisaient pas.
Source: Futura-sciences.
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