L'étude des - rares - malades en
rémission sans traitement pourrait déboucher sur la mise au point d'un moyen
d'éradiquer le sida.
Ils sont quatorze et de multiples
chercheurs s'intéressent à eux. Car l'organisme de ces personnes contaminées
par le virus du sida est toujours capable de contrôler le VIH plus de sept
années après l'arrêt de leur traitement antirétroviral. Après la description,
début mars, du cas d'un bébé en état de "rémission fonctionnelle", la
cohorte ANRS EP 47 Visconti (qui regroupe ces patients pas comme les autres)
confirme le rôle déterminant d'une intervention thérapeutique précoce. Ces
résultats, publiés hier dans PloS Pathogens, pourraient avoir d'importantes
implications dans la recherche de stratégies visant à éradiquer l'infection, ou
tout au moins à induire un contrôle stable et durable sans traitement.
Très tôt après l'infection d'un individu, le virus
du sida a la capacité de se cacher sous forme latente dans certaines cellules
immunitaires dont la durée de vie est très longue. C'est ainsi que le VIH peut
persister dans l'organisme, même après des années de traitement. Ces
"réservoirs" expliquent la remontée très rapide du nombre de virus
dans le sang (la virémie) dès que la prise d'antirétroviraux est interrompue
chez la majorité des patients. Il existe néanmoins quelques exceptions qui
passionnent les chercheurs.
Diminution du nombre de cellules
infectées :
La nouvelle étude française rapporte justement de
tels cas observés en France par les docteurs Laurent Hocqueloux et Thierry
Prazuck, à l'hôpital Orléans-La Source, ainsi que dans la cohorte ANRS CO 06
Primo (qui suit sur le long terme des patients nouvellement infectés). En 2009,
l'Agence nationale de recherche sur le sida (ANRS) a décidé de constituer et de
financer une équipe multidisciplinaire de chercheurs et d'établir une cohorte
de patients "contrôleurs après traitement" pour mieux comprendre
leurs caractéristiques et définir les mécanismes en jeu.
Les quatorze patients de la cohorte ANRS EP 47
Visconti ont été diagnostiqués au cours de leur primo-infection (dans les 10
semaines après l'infection) et ils ont immédiatement bénéficié d'une thérapie antirétrovirale
pendant une durée moyenne de trois ans avant d'arrêter toute prise
d'antirétroviraux. L'étude de ces personnes est coordonnée par le professeur
Christine Rouzioux (hôpital Necker et université Paris-Descartes), membre de
l'équipe ayant identifié le VIH en 1983, et le docteur Asier Sáez-Cirión
(Institut Pasteur), chercheur dans le laboratoire du professeur Françoise
Barré-Sinoussi.
Leurs travaux montrent une diminution du nombre de
cellules infectées circulant dans le sang des "contrôleurs après
traitement", au cours des quatre dernières années, malgré l'absence de
médicaments. Cela confirme le nouveau concept de "rémission
fonctionnelle" déjà évoqué. "Le traitement précoce a probablement
limité l'extension des réservoirs viraux et a préservé les réponses
immunitaires. Cette combinaison a certainement pu favoriser le contrôle de
l'infection après l'arrêt du traitement", explique le professeur Rouzioux
dans un communiqué.
Les résultats de l'étude ANRS EP 47 Visconti et ceux
récemment observés chez un bébé plaident donc en faveur d'une initiation
précoce du traitement antirétroviral. Et ils pourraient avoir des retombées
majeures en termes de recherche. "Les travaux actuels visent à comprendre
pourquoi et comment quelques patients traités en primo-infection arrivent à
contrôler durablement leur infection, sans médicaments", conclut le
professeur Jean-François Delfraissy, directeur de l'ANRS. D'ailleurs, une
cohorte européenne de patients "contrôleurs après traitement",
coordonnée par l'ANRS, sera réunie dans les prochains mois.
Source :
Le Point.
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