Plus d'un quart des femmes et 15 % des hommes
prennent régulièrement des compléments alimentaires, sans conseil médical et
pas à bon escient, selon une étude effectuée auprès de 79 786 adultes français.
Magnésium d'abord, puis vitamines B6 et C, sont en tête
des produits consommés par 15 % d'hommes et 28 % de femmes au moins trois jours
par semaine, selon cette étude conduite par Mathilde Touvier et sa doctorante
Camille Pouchieu pour l'Inserm, la CNAM, l'INRA et l'université Paris-13, et
parue dans le British Journal of Nutrition.
Ce travail porte sur un échantillon de 79 786
adultes français de 45 ans d'âge moyen, dont trois quarts de femmes,
participant à l'étude NutriNet-Santé. Parmi eux, 17 % fument et 33 % sont des
ex-fumeurs.
La consommation des compléments est assimilée à un
"coup de pouce" pour lutter contre la fatigue ou rester en bonne
santé. Les compléments – y compris des vitamines et des minéraux (fer, calcium,
zinc) vendus comme médicaments – sont dans la majorité des cas (55 %) prescrits
ou conseillés par un médecin, tandis que 45 % relèvent de l'automédication. 60
% sont consommés régulièrement depuis plus d'un an, en moyenne
quatre-vint-quinze jours par an, sous forme de cures ou en permanence.
"NOUS NE RECOMMANDONS PAR LA PRISE DE COMPLÉMENTS"
Les consommateurs de compléments alimentaires,
comparés aux non-consommateurs, connaissent mieux les recommandations
nutritionnelles du programme national nutrition santé (PNNS), consomment plus
d'aliments bio et ont globalement une alimentation et un mode de vie plus sains
(non-fumeurs, plus d'activité physique...), constate Mathilde Touvier.
En substance, ils pourraient peut-être économiser
leur argent... et se passer de ces compléments. D'une façon générale,
"nous ne recommandons pas la prise de compléments, mais plutôt une
alimentation variée conforme aux recommandations du PNNS", relève la
chercheuse.
De leur côté, les fumeurs prennent moins de
compléments alimentaires que les non-fumeurs (19 % contre 25 %), mais leur
consommation reste importante et ils sont plus enclins à se passer d'avis
médical (55 % d'automédication), malgré des risques vis-à-vis du développement
de certaines maladies comme le cancer. Pourtant, la prise de bêta-carotène (un
précurseur de la vitamine A) peut par exemple contribuer à réveiller des
tumeurs latentes chez les fumeurs, souligne Mme Touvier.
Les compléments alimentaires peuvent en effet
interférer de façon indésirable avec des médicaments, rappelle-t-elle en
évoquant un travail récent qui a évalué en détail 1 491 interactions entre 213
compléments alimentaires et 509 médicaments. Les médicaments ayant pour cible
le système nerveux central ou cardiovasculaire sont ceux pour lesquels le plus
d'interactions indésirables avec les compléments alimentaires ont été décrites.
Le devenir des médicaments dans l'organisme peut ainsi être altéré,
l'efficacité du traitement amoindri, voire parfois au contraire majoré avec
effet de surdose.
"On sait ainsi que des compléments alimentaires
à base de produits naturels sont particulièrement contre-indiqués chez les
patients atteints de cancers gynécologiques (gattilier, DHEA, trèfle rouge,
luzerne, soja, igname sauvage), du sein (gattilier, DHEA, trèfle rouge,
luzerne, soja, igname sauvage, cohosh noir), de cancer de la prostate
(gattilier, DHEA, trèfle rouge, huile de lin) et de leucémies
(échinacée)", souligne Mme Touvier. Certaines plantes (phyto-oestrogènes
type soja et extrait de sauge et phyto-progestagènes type yam et gattilier) sont
ainsi déconseillées pour les femmes qui ont eu un diagnostic de cancer du sein,
précise-t-elle.
Source: Le monde.
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