dimanche 7 octobre 2012

Les bêtabloquants ne serviraient pas à grand chose dans la maladie coronaire



Les bêtabloquants étaient la pierre angulaire des traitements préventifs en cardiologie. Ils étaient devenus le traitement standard après un infarctus pour prévenir la survenue de nouveaux accidents cardiovasculaires. Par extension, les cardiologues en avaient fait le traitement de référence dans la maladie coronaire, lui prêtant une efficacité protectrice avant même la survenue de tout accident cardiaque. Une étude internationale, l’essai REACH, publié dans la revue Américaine JAMA, remet brutalement le dogme en question. Les bêtabloquants ne protégeraient pas les millions de patients à qui ils sont prescrits de la survenue d’un infarctus, d’un accident vasculaire cérébral ou d’un décès. 


Historiquement, les bêtabloquants avaient montré qu’ils pouvaient protéger un patient ayant fait un  infarctus de la survenue de nouveaux évènements cardiovasculaires. Mais ces études sont aujourd’hui anciennes et de nouvelles techniques sont depuis apparues, comme l’angioplastie ou les pontages pour reperfuser les artères coronaires. Pourtant, au fil du temps, sans preuve scientifique réelle, les bêtabloquants se sont imposés comme des médicaments essentiels, bien que souvent les patients les tolèrent difficilement. Les auteurs citent une étude montrant qu’un an après un infarctus, seulement 45% des patients continuent à prendre un bêtabloquant.

L’étude REACH (Reduction of Atherothrombosis for Continued Healthcare) est un registre international qui a inclus 45 000 patients de 45 ans et plus, ayant une maladie artérielle en un ou plusieurs endroits, cœur (maladie coronaire), cerveau (une maladie vasculaire cérébrale), membres inférieurs (artériopathie oblitérante des membres inférieurs), carotide, ou simplement des facteurs de risque de développer de telles pathologies (tabagisme, hyperlipidémie, diabète, etc.). Ces patients, dont les traitements médicaux étaient clairement notés, ont été suivis pendant près de 44 mois et tout évènement cardiovasculaire enregistré, permettant d’évaluer nombre de données pertinentes. La présente publication avait pour but d’évaluer la protection cardiovasculaire apportée par les bêtabloquants.

L’analyse des auteurs a inclus 21 860 patients : 6700 patients ayant fait un infarctus, 7000 patients coronariens qui n’avaient pas fait d’infarctus, et 18 000 patients athéromateux à risque. Deux groupes ont été constitué, l’un ayant un bêtabloquant, l’autre non afin d’analyser une éventuelle protection apportée par les bêtabloquants. Comme évènements, étaient retenus pour l’analyse, la survenue d’un infarctus non mortel, d’un accident vasculaire cérébral non mortel ou la survenue d’un décès.

Malheureusement les résultats démontrent une totale absence de protection liée aux bêtabloquants : les patients qui en prenaient ne faisaient pas moins d’infarctus, ni moins d’accident vasculaire cérébral, et le même nombre de décès était enregistré dans les deux groupes. Même les patients qui avaient déjà fait un infarctus et chez lesquels des preuves antérieures montraient un intérêt des bêtabloquants, n’étaient finalement pas mieux protégés. Pire, dans le groupe des patients qui n’avaient que des facteurs de risque, les bêtabloquants auraient même un effet délétère.

Evidemment, cette étude n’est pas un essai randomisé en double aveugle et un registre peut toujours être source de biais. Ceci étant, ces résultats corroborent plusieurs essais antérieurs plus petits qui chez des patients coronariens ou simplement hypertendus, qui ne retrouvaient pas non plus d’effet protecteur des bêtabloquants. Selon les auteurs, ces résultats montrant le moindre intérêt thérapeutique des bêtabloquants chez les patients coronariens stables, sont déjà prises en compte dans les recommandations internationales qui ont dégradé récemment cette classe thérapeutique. Pour les patients en post infarctus, les bêtabloquants n’auraient plus qu’un intérêt sur une durée de temps limitée qu’il reste à déterminer; un an? Trois ans?  Pour les auteurs, il serait dorénavant important de mener d’autres essais qui viseraient à déterminer quels patients pourraient bénéficier d’un bêtabloquant et sur quelle durée. En tous les cas, les bêtabloquants se seront probablement plus la pierre angulaire des traitements préventifs en cardiologie.

Source: β-Blocker Use and Clinical Outcomes in Stable Outpatients With and Without Coronary Artery Disease, JAMA. 2012.

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