Un médicament proche du Viagra améliore la
circulation du sang dans les muscles.
Le tadalafil, un traitement utilisé contre les
troubles de l'érection pourrait s'avérer utile dans le traitement des
myopathies. Il faudra bien sûr attendre des essais de plus grande envergure
avant de l'envisager pour les patients car l'étude anglo-saxonne publiée le 28
novembre dans la revue Science Translational Medicine ne porte que sur neuf
patients. Ce travail est néanmoins «encourageant», assure Serge Braun le
directeur scientifique de l'AFM-Téléthon, qui ne pouvait rêver plus belle
illustration de l'intérêt de la recherche fondamentale à quelques jours du
Téléthon (7 et 8 décembre). C'est en effet la première fois que ce test est
réalisé chez l'homme.
«C'est un premier pas important sur un mécanisme
responsable de la faiblesse musculaire de la dystrophie de Becker», explique au
Figarole Pr Elizabeth McNally, experte renommée des maladies neuromusculaires,
qui dirige un laboratoire de recherche à l'université de Chicago. La maladie,
ou dystrophie musculaire de Becker, est une myopathie proche de celle de
Duchenne, mais moins connue du public car moins fréquente (1 cas sur 18.000 à
31.000 garçons), souvent plus modérée et diagnostiquée plus tardivement, entre
5 et 25 ans. La myopathie de Duchenne est en revanche plus fréquente et frappe
un garçon sur 3000 avant l'âge de 5 ans.
L'idée d'utiliser des inhibiteurs de la
phosphodiestérase V (Viagra®, Cialis®, Levitra®) dans les myopathies n'est pas
nouvelle, mais elle n'avait pour l'instant été expérimentée que sur des souris.
Normalement, chez un sujet sain, les vaisseaux qui acheminent l'oxygène vers
les muscles doivent se dilater pour que le débit soit suffisant. Or, «dans les
dystrophies musculaires, les vaisseaux sanguins qui nourrissent les muscles
restent contractés. Les médicaments comme le tadalafil augmentent le flux
d'oxygène en relâchant la contraction des vaisseaux sanguins. On inverse le
processus», détaille le Pr McNally.
Depuis plusieurs années, des équipes étudient donc
l'action de ces molécules sur un modèle animal de la dystrophie musculaire de
Duchenne. Le problème, c'est que pour être efficace, il faut chez la souris
employer des doses très élevées, de 500 à 1000 fois supérieures aux doses
maximales de tadalafil utilisées chez l'homme contre les troubles de l'érection
(20 mg).
Les chercheurs ont tout de même voulu vérifier s'il
n'était pas possible d'obtenir un effet bénéfique dans la maladie de Becker
avec une seule prise de 20 mg. Le résultat souligné par le Pr Elizabeth Martin
et ses collègues du Cedars-Sinai Medical Center, aux États-Unis, est à la
hauteur de leurs espoirs. «Le tadalafil lève l'ischémie (asphyxie cellulaire,
NDLR) et restaure complètement la circulation sanguine chez huit patients sur
neuf», écrivent-ils. L'étude ne permet pas cependant de savoir si en
rétablissant la circulation du sang dans les muscles lors de l'effort, on
améliore in fine la force musculaire et surtout si on ralentit la progression
de la maladie.
L'effet à long terme
«Tout ce que l'on peut dire, c'est que cette étude
prouve la validité du concept et la tolérance du médicament. Mais il faudra des
années pour démontrer l'efficacité clinique, c'est-à-dire un bénéfice réel pour
le patient», pondère Serge Braun. Il faudra notamment vérifier que le bénéfice
s'étend au cœur. Or, dans cette étude, les patients ne devaient pas avoir
d'atteinte cardiaque manifeste pour participer. Autre bémol de taille soulevé
par le Pr McNally, «on ne sait pas si cela sera efficace comme traitement
prolongé puisque les patients de cette étude n'ont reçu qu'une seule dose, la prochaine
étape sera d'évaluer l'effet du tadalafil à long terme».
Enfin, le traitement n'a eu aucun effet sur l'un des
neuf patients sans que les auteurs ne parviennent à l'expliquer. De même que
l'idée du traitement est née des recherches fondamentales sur les mécanismes de
la maladie, il faudra sans doute retourner au laboratoire pour en comprendre
les limites.
Source: Le figaro.
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