L'implant cochléaire, cette prothèse de
l'oreille interne qui pallie la cochlée déficiente, n'est plus l'horizon
indépassable de la lutte contre la surdité profonde ou sévère. Des travaux
récents venus d'horizons divers suggèrent que de nouvelles voies thérapeutiques
pourraient voir le jour.
En juillet, une équipe américaine a ainsi montré,
chez des souris rendues sourdes par génie génétique, qu'il était possible de
restaurer l'audition en introduisant dans certaines cellules de la cochlée une
copie normale du gène. Celui-ci rétablit leur capacité à transmettre
l'information codée à partir du message sonore. Décrite dans Neuron du 26
juillet, cette thérapie génique s'appuie sur des virus pour transférer le gène
réparateur dans le noyau de la cellule atteinte. Il faudra encore bien des
étapes pour passer de la souris à l'homme, mais la technique semble
prometteuse.
C'est aussi le cas d'une tout autre approche,
décrite jeudi 13 septembre dans la revue Nature et testée sur la gerbille, un
petit rongeur très utilisé dans l'étude de l'audition. Une équipe de
l'université de Sheffield a réussi à produire in vitro, à partir de cellules
souches embryonnaires humaines, des cellules ayant les caractéristiques de deux
types de populations de la cochlée : les unes sont des "précurseurs"
des cellules sensorielles et les autres des neurones auditifs.
Mieux encore, les cellules du second type ont été
implantées dans la cochlée de gerbilles dont les neurones auditifs avaient été
endommagés par un traitement chimique. La greffe a pris ; les cellules
neuronales ont poussé, rétablissant le contact rompu entre les celluels
sensorielles qui transforment le signal acoustique en impulsions nerveuses, et
des neurones centraux qui permettent d'acheminer ces signaux au cerveau. Alors
que les souris non transplantées ne répondaient à aucune stimulation sonore,
celles qui avaient reçu les progéniteurs neuronaux répondaient à une
stimulation qui devait toutefois être assez intense.
"Approche pragmatique"
L'équipe prend soin de préciser qu'"aucune
tumeur n'a été détectée sur les animaux transplantés". C'est en effet
l'une des questions posées par les thérapies à base de lignées de cellules
souches embryonnaires : la reprogrammation dont elles font l'objet pour les
conduire à se différencier est-elle de nature à induire des proliférations
cancéreuses ? Pour la spécialiste de l'audition Christine Petit (prefesseur au
Collège de France, Inserm, Institut Pasteur, UPMC), "avant les essais
cliniques, le développement de l'approche chez le singe semble
incontournable".
Pour autant, elle salue la démonstration de l'équipe
britannique et son "approche pragmatique". Elle note que toute
approche thérapeutique nouvelle de la surdité profonde se mesure à l'aune de
l'implant cochléaire qui, bien qu'imparfait, "a mis la barre très
haut". Or la greffe issue de cellules souches embryonnaires est présentée
comme un complément à l'implant : le nombre des neurones auditifs stimulables
par les électrodes de celui-ci est réduit dans beaucoup de formes de surdité
profonde ou sévère. En l'augmentant , on peut escompter une amélioration de son
efficacité.
Source : Le monde.
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