lundi 13 août 2012

Des cellules souches dans les tumeurs


Trois équipes montrent que les cellules d’une tumeur maligne ne contribuent pas toutes de la même façon à sa croissance. Une petite partie d’entre elles l’alimentent en se comportant comme des cellules souches.
Si la survie des patients atteints de cancer s’améliore grâce à des diagnostics plus précoces et des traitements plus efficaces, environ un tiers décèdent encore dans les cinq ans suivant le diagnostic, souvent à cause d’une récidive. Pourquoi une tumeur que l’on croyait éliminée prolifère-t-elle à nouveau ? Depuis quelques années, les biologistes s’interrogent sur l’existence, dans les tumeurs, de « cellules souches cancéreuses » : ces cellules, si elles ne sont pas toutes éliminées, auraient la capacité de se différencier et de proliférer après les traitements, entraînant une rechute. Toutefois, jusqu’à présent, la preuve de leur existence était indirecte : transplantée chez une souris immunodéficiente, une sous-population de cellules tumorales reforme une tumeur à l’identique. Trois équipes viennent de clore le débat en détectant, chez la souris, des cellules se comportant comme des cellules souches dans trois types différents de tumeurs natives.




Arnout Schepers, Hugo Snippert et leurs collègues de l’Institut Hubrecht, à Utrecht aux Pays-Bas, ont observé ces cellules dans un adénome intestinal, une tumeur bénigne précurseur du cancer intestinal. Par ailleurs, Gregory Driessens, de l’Université libre de Bruxelles, en Belgique, et ses collègues, ont montré leur existence dans une tumeur bénigne de la peau (un papillome) et ont étudié leur devenir dans une tumeur maligne de la peau (un carcinome). Enfin, Jian Chen, du Centre médical de l’Université du Sud-Ouest du Texas, à Dallas aux États-Unis, et ses collègues, ont observé, dans une tumeur maligne du cerveau (un glioblastome), qu’une petite population de cellules propage la tumeur après chimiothérapie.

Les deux premières équipes ont montré que les cellules tumorales ne sont pas équivalentes : certaines prolifèrent peu et constituent l'essentiel de la tumeur, tandis que d’autres persistent longtemps et se comportent comme des cellules souches. En marquant aléatoirement les cellules tumorales, les biologistes ont observé que si la plupart des cellules des tumeurs bénignes étudiées proliféraient peu et disparaissaient au bout de quelques semaines, 20 pour cent présentaient le comportement de cellules souches : capables de persister plusieurs mois, elles se divisaient en de nombreuses cellules, lesquelles occupaient alors une part importante de la tumeur. En outre, ces cellules se différenciaient et engendraient l'ensemble des types de cellules tumorales.

Dans une tumeur maligne de la peau, en revanche, la proportion de cellules de type cellules souches était beaucoup plus importante, comme si la hiérarchie entre cellules de la tumeur bénigne laissait place à l’anarchie. Les travaux de la troisième équipe vont aussi dans ce sens. En marquant les cellules souches neurales d’une souris atteinte d’un glioblastome, J. Chen et ses collègues ont montré qu’une sous-population repeuple la tumeur après un traitement anticancéreux. En revanche, l’utilisation conjointe d’un anticancéreux et d’une molécule bloquant la prolifération des cellules souches neurales entrave la croissance tumorale. Ces résultats suggèrent donc que si les tumeurs ont bien des cellules souches cancéreuses, ces denières pourraient effectivement être responsables du processus de récidive.

Tient-on une piste pour éradiquer les tumeurs ? Pour Benjamin Beck, coauteur de la deuxième étude, ces travaux sur trois types de tumeurs et par deux méthodes sont très encourageants, mais la route sera encore longue : « Retrouve-t-on ce comportement dans d’autres types de cancers ? Quelles sont les caractéristiques des cellules se comportant comme des cellules souches ? Comment évoluent-elles au cours de la pathologie ? Comment une tumeur devient-elle maligne ? Suffit-il d’éliminer ces cellules pour supprimer le risque de récidive ? Nous devrons répondre à toutes ces questions avant d’envisager une stratégie thérapeutique. »

Source: Pour la science.

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