Des équipes de chercheurs de l’Institut Pasteur et
du CNRS viennent de mettre au point, en combinant deux méthodes récentes
d’imagerie, une nouvelle approche de microscopie optique permettant de
visualiser des assemblages moléculaires avec une résolution environ 10 fois
meilleure que les microscopes traditionnels, tout en respectant leur fonction
biologique. Grâce à cette approche, ils ont pu observer, pour la première fois
dans une cellule par voie optique, le virus du sida et sa capside (contenant le
génome du VIH) à une résolution de 30 nanomètres. L’approche développée
représente une avancée majeure, ouvrant la voie à des analyses moins invasives
et plus précises de micro-organismes pathogènes présents dans des cellules
hôtes humaines vivantes. Cette étude est en ligne sur le site de la revue PNAS.
Depuis toujours, il est nécessaire pour les
chercheurs de pouvoir visualiser les virus qu’ils étudient dans l’environnement
de leur cellule cible, afin de définir les interactions hôte-pathogène
contribuant à l’infection. La microscopie optique, qui utilise des molécules
fluorescentes (comme les protéines GFP ou des anticorps couplés à des
fluorophores synthétiques) permet de mettre en avant les différentes structures
d’une cellule, dont les protéines. Cependant, cette méthode est limitée par son
faible pouvoir de résolution, ne pouvant distinguer des structures cellulaires
et moléculaires qu’à une échelle de 200 à 300 nanomètres (nm). La plupart des
virus étant de taille inférieure, il est nécessaire de recourir à des
techniques d’imagerie plus précises, afin de définir leur structure interne.
Une étude coordonnée par le Dr Christophe Zimmer(1)
(Institut Pasteur/CNRS), en collaboration avec le Dr Nathalie Arhel(2) au sein
du laboratoire du Pr Pierre Charneau(3) (Institut Pasteur/CNRS), révèle que
l’association de deux techniques récentes d’imagerie permet d’obtenir des
images uniques d’assemblages moléculaires de la capside du VIH-1, avec une
résolution environ 10 fois meilleure que les microscopes optiques
traditionnels. Cette approche, qui utilise la microscopie super-résolutive PALM
et le marquage FlAsH, n’affecte pas la capacité du virus à se répliquer. Elle
représente une avancée majeure pour la recherche en biologie moléculaire,
permettant de visualiser des complexes microbiens à une échelle de 30 nm dans
les cellules sans perturber leur fonction.
L’approche développée combine la microscopie
super-résolutive PALM et le marquage FlAsH. La microscopie PALM se fonde sur la
prise de milliers de clichés en basse résolution, dont chacun ne montre que
quelques molécules fluorescentes. Les positions de ces molécules sont ensuite
calculées et assemblées par ordinateur afin d’obtenir une seule image en haute
résolution. Le marquage FlAsH, quant à lui, implique la fusion d’un peptide de
6 acides aminés à la protéine étudiée, auquel se lie le fluorophore FlAsH.
Cette liaison génère de la fluorescence, permettant ainsi la visualisation de
cette protéine. C’est la première fois qu’une équipe de chercheurs regroupe ces
deux méthodes afin d’obtenir des images en haute-définition d’une structure
moléculaire aussi bien dans des cellules fixées que dans des cellules vivantes.
Grâce à cette nouvelle approche, les chercheurs ont
pu visualiser la morphologie du virus du sida à une échelle de 30 nm et
localiser sa capside dans des cellules humaines. Les capsides sont des
structures coniques qui contiennent le génome du VIH. Ces structures doivent se
défaire pour permettre au génome du VIH de s’intégrer dans celui de la cellule
hôte. Cependant, la chronologie de ce désassemblage a longtemps été débattue.
Selon une hypothèse dominante, la capside se désassemblerait immédiatement
après infection de la cellule et ne jouerait donc qu’un rôle marginal dans le
voyage intracellulaire du virus vers le noyau. Les résultats obtenus par les
chercheurs de l’Institut Pasteur et du CNRS indiquent, au contraire, que de
nombreuses capsides restent intactes jusqu’à l’entrée du VIH dans le noyau des
cellules, confirmant et renforçant de précédentes études en microscopie
électronique. Ainsi, les capsides pourraient jouer un rôle plus important que
communément admis dans le cycle réplicatif du virus.
Le développement de cette nouvelle approche de
microscopie optique par les chercheurs de l’Institut Pasteur et du CNRS offre
des perspectives uniques pour la biologie moléculaire. En effet, cette nouvelle
technique d’imagerie pourrait devenir un outil important dans l’analyse de
nombreux complexes microbiens et de leurs interactions avec des cellules hôtes
à l’échelle moléculaire. Cette technique non-invasive permet d’observer des
protéines sans détruire, ni altérer, leur fonction biologique. Par ailleurs,
elle pourrait, à terme, rendre possible l’analyse de micro-organismes à des
résolutions de l’ordre du nanomètre, permettant ainsi de passer de la
microscopie à la « nanoscopie ». La prochaine étape sera, par conséquent, le
partage de cette approche avec la communauté scientifique, son développement et
son application à l’étude d’autres micro-organismes pathogènes.
Source : Super
resolution imaging of HIV in infected cells with FlAsH-PALM, en ligne sur le
site de PNAS, le 14 mai 2012
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