La tuberculose est l’une des maladies
infectieuses les plus mortelles au monde. Un tiers de la population mondiale
serait porteur de la bactérie sans en déclarer les symptômes. Une découverte
récente montre que la bactérie se cacherait dans les os. En ce 24 mars, Journée
nationale de lutte contre la tuberculose, Antonio Campos-Neto, à l’origine de
cette avancée, explique cette curieuse stratégie à Futura-Sciences.
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Nombre estimé de cas de tuberculose pour 100.000 personnes. En bleu vif : de 0 à 10 ; entre bleu et jaune : de 10 à 100 ; en jaune vif : de 100 à 1.000 personnes malades. |
Avec 8,8 millions de personnes atteintes et 1,4
million de morts en 2012, la tuberculose est l’une des maladies les plus
meurtrières au monde, juste après le Sida. La tuberculose est une maladie
infectieuse qui touche principalement les poumons (on parle de tuberculose
pulmonaire).L’agent responsable de cette maladie est la bactérie Mycobacterium
tuberculosis, qui se propage par voie aérienne lorsqu’une personne infectée
tousse, éternue ou crache. M. tuberculosis est une bactérie très résistante :
elle peut rester un mois dans des crachats desséchés et plusieurs mois dans la
terre ! D’autre part, seules une dizaine de bactéries sont nécessaires pour
déclencher la maladie.
En ce 24 mars, déclaré Journée mondiale de lutte
contre la tuberculose par l’OMS, Futura-Sciences revient sur cette maladie et
sur les progrès récents réalisés par la recherche.
La tuberculose portée par un tiers de la population
mondiale
Une fois les bactéries dans les poumons, les
fonctions immunitaires de l’hôte infecté se mettent en marche. Néanmoins, quand
les mécanismes de défense ne sont pas suffisants, deux scénarios sont possibles
: la personne tombe malade (on parle alors de tuberculose active), ou bien elle
n’a pas de symptômes et n'est pas contagieuse (on parle alors d’infection
latente). Le nombre de porteurs sains est estimé à 2,2 milliards de personnes,
soit presque un tiers de la population mondiale ! Heureusement, parmi ces personnes
saines infectées, seuls 5 à 10 % développeront effectivement la maladie plus
tard. Dans une étude récente publiée dans Science Translational Medecine,
l’équipe d’Antonio Campos-Neto, directeur du département d’immunologie et de
maladies infectieuses au Forsyth Institute à Cambridge aux États-Unis,
s’intéresse à cette problématique.
Selon Antonio Campos-Neto, la compréhension du
mécanisme par lequel la bactérie peut rester dans l’organisme à l’état dormant
est essentielle au développement de futurs traitements. « Le but de notre étude
était de trouver la cachette de M. tuberculosis dans l’hôte, c’est-à-dire
l’endroit privilégié où les bactéries ne sont pas la proie du système
immunitaire. » M. tuberculosis est un pathogène intracellulaire pouvant se
développer dans de nombreuses cellules comme les macrophages ou les cellules
dendritiques. Néanmoins, ces cellules se divisent souvent et entrent
régulièrement en contact avec le système immunitaire.
Et si M. tuberculosis se cachait dans la moelle
osseuse ? « Les cellules souches de la moelle osseuse sont localisées dans un
site de privilège immun, c’est-à-dire un endroit auquel le système immunitaire
a peu accès, explique Antonio Campos-Neto. Pour les pathogènes
intracellulaires, ces cellules représentent une cachette parfaite ! » Les
chercheurs ont montré que M. tuberculosis pouvait en effet se terrer dans les
cellules souches de moelle osseuse chez la souris. De plus, ils ont retrouvé
des M. tuberculosis dans la moelle osseuse de deux patients indiens (parmi
neuf) ayant été traités contre la tuberculose.
Les os, cachettes d’autres pathogènes ?
Bien que de nombreux aspects de la tuberculose
restent à décrypter, cette étude apporte un éclairage sur la façon dont la
bactérie peut s’installer à l’état dormant dans un organisme. « M. tuberculosis
peut rester un grand nombre d’années dans l’organisme sans provoquer de
maladie, et de nombreux facteurs impliqués dans cette latence reste à élucider.
D’autre part, peu de choses sont connues sur les mécanismes par lesquels M.
tuberculosis passe de l’état dormant à l’état infectieux. »
Cette étude soulève de nombreuses questions. On peut
par exemple se demander si d’autres pathogènes intracellulaires pourraient
utiliser la même stratégie. « C’est une hypothèse très plausible, et des
recherches dans ce sens sont en court au laboratoire. Par exemple, les parasites
du genre Leishmania, responsables de la fièvre noire, pourraient également se
dissimuler dans les cellules souches osseuses. »
Avec l’émergence de souches de M. tuberculosis
résistantes aux antibiotiques, il devient urgent de trouver de nouveaux moyens
de combattre la tuberculose. Cette étude ouvre la voie vers de nouveaux axes de
recherche prometteurs.
Source :
Futura-science.
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